Anmelden (DTAQ) DWDS     dlexDB     CLARIN-D

Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838.

Bild:
<< vorherige Seite

entre nos coeurs dechires ce hideux rieur aux
ecoutes, et endurer ses moqueries; cette idee
me revoltait, elle bouleversait tous mes sens: je
considerai les evenemens passes comme une
destinee irrevocable, et ma misere comme con-
sommee. Je repris la parole et lui dis:

"Monsieur, je vous ai vendu mon ombre
pour cette bourse merveilleuse, et je m'en suis
assez repenti; voulez-vous revenir sur le marche,
au nom de Dieu!" Il secoua la tete, et une
hideuse grimace donna a scs traits l'expression
la plus sinistre. Je poursuivis: "Eh bien, je
ne vous vendrai plus rien qui m'appartienne,
meme au prix de mon ombre, et je ne signe-
rai pas. Vous concevrez donc, Monsieur, que
le deguisement auquel vous m'invitez, serait
beaucoup plus divertissant pour vous que pour
moi. Vous recevrez mes excuses, et les choses
en etant la, separons-nous.

-- "Je suis vraiment fache, M. Schemihl,
que vous vous entetiez sottement a refuser un
marche que je vous proposais en ami; mais je
serai peut etre plus heureux une autre fois; au
revoir. -- A propos, il faut que je vous montre
encore que je ne laisse pas deperir les ehoses

entre nos coeurs déchirés ce hideux rieur aux
écoutes, et endurer ses moqueries; cette idée
me révoltait, elle bouleversait tous mes sens: je
considérai les événemens passés comme une
destinée irrévocable, et ma misère comme con-
sommée. Je repris la parole et lui dis:

«Monsieur, je vous ai vendu mon ombre
pour cette bourse merveilleuse, et je m’en suis
assez repenti; voulez-vous revenir sur le marché,
au nom de Dieu!» Il secoua la tête, et une
hideuse grimace donna à scs traits l’expression
la plus sinistre. Je poursuivis: «Eh bien, je
ne vous vendrai plus rien qui m’appartienne,
même au prix de mon ombre, et je ne signe-
rai pas. Vous concevrez donc, Monsieur, que
le déguisement auquel vous m’invitez, serait
beaucoup plus divertissant pour vous que pour
moi. Vous recevrez mes excuses, et les choses
en étant là, séparons-nous.

— «Je suis vraiment fâché, M. Schémihl,
que vous vous entêtiez sottement à refuser un
marché que je vous proposais en ami; mais je
serai peut être plus heureux une autre fois; au
revoir. — A propos, il faut que je vous montre
encore que je ne laisse pas dépérir les ehoses

<TEI>
  <text>
    <body>
      <div n="1">
        <p><pb facs="#f0084" n="62"/>
entre nos coeurs déchirés ce hideux rieur aux<lb/>
écoutes, et endurer ses moqueries; cette idée<lb/>
me révoltait, elle bouleversait tous mes sens: je<lb/>
considérai les événemens passés comme une<lb/>
destinée irrévocable, et ma misère comme con-<lb/>
sommée. Je repris la parole et lui dis:</p><lb/>
        <p>«Monsieur, je vous ai vendu mon ombre<lb/>
pour cette bourse merveilleuse, et je m&#x2019;en suis<lb/>
assez repenti; voulez-vous revenir sur le marché,<lb/>
au nom de Dieu!» Il secoua la tête, et une<lb/>
hideuse grimace donna à scs traits l&#x2019;expression<lb/>
la plus sinistre. Je poursuivis: «Eh bien, je<lb/>
ne vous vendrai plus rien qui m&#x2019;appartienne,<lb/>
même au prix de mon ombre, et je ne signe-<lb/>
rai pas. Vous concevrez donc, Monsieur, que<lb/>
le déguisement auquel vous m&#x2019;invitez, serait<lb/>
beaucoup plus divertissant pour vous que pour<lb/>
moi. Vous recevrez mes excuses, et les choses<lb/>
en étant là, séparons-nous.</p><lb/>
        <p>&#x2014; «Je suis vraiment fâché, M. Schémihl,<lb/>
que vous vous entêtiez sottement à refuser un<lb/>
marché que je vous proposais en ami; mais je<lb/>
serai peut être plus heureux une autre fois; au<lb/>
revoir. &#x2014; A propos, il faut que je vous montre<lb/>
encore que je ne laisse pas dépérir les ehoses<lb/></p>
      </div>
    </body>
  </text>
</TEI>
[62/0084] entre nos coeurs déchirés ce hideux rieur aux écoutes, et endurer ses moqueries; cette idée me révoltait, elle bouleversait tous mes sens: je considérai les événemens passés comme une destinée irrévocable, et ma misère comme con- sommée. Je repris la parole et lui dis: «Monsieur, je vous ai vendu mon ombre pour cette bourse merveilleuse, et je m’en suis assez repenti; voulez-vous revenir sur le marché, au nom de Dieu!» Il secoua la tête, et une hideuse grimace donna à scs traits l’expression la plus sinistre. Je poursuivis: «Eh bien, je ne vous vendrai plus rien qui m’appartienne, même au prix de mon ombre, et je ne signe- rai pas. Vous concevrez donc, Monsieur, que le déguisement auquel vous m’invitez, serait beaucoup plus divertissant pour vous que pour moi. Vous recevrez mes excuses, et les choses en étant là, séparons-nous. — «Je suis vraiment fâché, M. Schémihl, que vous vous entêtiez sottement à refuser un marché que je vous proposais en ami; mais je serai peut être plus heureux une autre fois; au revoir. — A propos, il faut que je vous montre encore que je ne laisse pas dépérir les ehoses

Suche im Werk

Hilfe

Informationen zum Werk

Download dieses Werks

XML (TEI P5) · HTML · Text
TCF (text annotation layer)
XML (TEI P5 inkl. att.linguistic)

Metadaten zum Werk

TEI-Header · CMDI · Dublin Core

Ansichten dieser Seite

Voyant Tools ?

Language Resource Switchboard?

Feedback

Sie haben einen Fehler gefunden? Dann können Sie diesen über unsere Qualitätssicherungsplattform DTAQ melden.

Kommentar zur DTA-Ausgabe

Dieses Werk wurde im Rahmen des Moduls DTA-Erweiterungen (DTAE) digitalisiert. Weitere Informationen …




Ansicht auf Standard zurückstellen

URL zu diesem Werk: https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786
URL zu dieser Seite: https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/84
Zitationshilfe: Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 62. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/84>, abgerufen am 05.12.2024.