eternelles et au milieu des feux que vomissaient les volcans; souvent j'avais peine a respirer. Je cherchai le detroit de Behring et repassai en Asie. J'en suivis la cote orientale dans tou- tes ses sinuosites, examinant avec attention, quelles seraient celles des eiles voisines qui pour- raient m'etre accessibles.
De la presqu'eile de Malacca mes bottes me porterent sur les eiles jusqu'a celle de Lamboc. Je m'efforcai, non sans m'exposer a de grands dangers, de me frayer au travers des roches et des ecueils dont ces mers sont remplies, une route vers Borneo, et puis vers la nouvelle Hol- lande; il fallut y renoncer. Je m'assis enfin sur le promontoire le plus avance de l'eile que j'a- vais pu atteindre, et tournant mes regards vers cette partie du monde qui m'etait interdite, je me mis a pleurer, comme devant la grille d'un cachot, d'avoir sitot rencontre les bornes qui m'etaient prescrites. En effet la portion de la terre la plus necessaire a l'intelligence de l'en- semble m'etait fermee, et je voyais des l'abord, le fruit de mes travaux reduit a de simples fragmens. O, mon cher Adelbert, qu'est-ce donc que toute l'activite des hommes!
éternelles et au milieu des feux que vomissaient les volcans; souvent j’avais peine à respirer. Je cherchai le détroit de Behring et repassai en Asie. J’en suivis la côte orientale dans tou- tes ses sinuosités, examinant avec attention, quelles seraient celles des îles voisines qui pour- raient m’être accessibles.
De la presqu’île de Malacca mes bottes me portèrent sur les îles jusqu’à celle de Lamboc. Je m’efforçai, non sans m’exposer à de grands dangers, de me frayer au travers des roches et des écueils dont ces mers sont remplies, une route vers Bornéo, et puis vers la nouvelle Hol- lande; il fallut y renoncer. Je m’assis enfin sur le promontoire le plus avancé de l’île que j’a- vais pu atteindre, et tournant mes regards vers cette partie du monde qui m’était interdite, je me mis à pleurer, comme devant la grille d’un cachot, d’avoir sitôt rencontré les bornes qui m’étaient prescrites. En effet la portion de la terre la plus nécessaire à l’intelligence de l’en- semble m’était fermée, et je voyais dès l’abord, le fruit de mes travaux réduit à de simples fragmens. O, mon cher Adelbert, qu’est-ce donc que toute l’activité des hommes!
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éternelles et au milieu des feux que vomissaient
les volcans; souvent j’avais peine à respirer.
Je cherchai le détroit de Behring et repassai
en Asie. J’en suivis la côte orientale dans tou-
tes ses sinuosités, examinant avec attention,
quelles seraient celles des îles voisines qui pour-
raient m’être accessibles.
De la presqu’île de Malacca mes bottes me
portèrent sur les îles jusqu’à celle de Lamboc.
Je m’efforçai, non sans m’exposer à de grands
dangers, de me frayer au travers des roches
et des écueils dont ces mers sont remplies, une
route vers Bornéo, et puis vers la nouvelle Hol-
lande; il fallut y renoncer. Je m’assis enfin sur
le promontoire le plus avancé de l’île que j’a-
vais pu atteindre, et tournant mes regards vers
cette partie du monde qui m’était interdite, je
me mis à pleurer, comme devant la grille d’un
cachot, d’avoir sitôt rencontré les bornes qui
m’étaient prescrites. En effet la portion de la
terre la plus nécessaire à l’intelligence de l’en-
semble m’était fermée, et je voyais dès l’abord,
le fruit de mes travaux réduit à de simples
fragmens. O, mon cher Adelbert, qu’est-ce donc
que toute l’activité des hommes!
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Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 108. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/138>, abgerufen am 24.07.2024.
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