Anmelden (DTAQ) DWDS     dlexDB     CLARIN-D

Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838.

Bild:
<< vorherige Seite

-- "Bendel, repris-je en hesitant, apres
"un assez long silence, Bendel, maintenant tu
"connais mon secret, et tu peux le trahir. Va,
"denonce-moi; eleve contre moi ton temoignage."
-- Je m'apercus qu'un violent combat se pas-
sait en lui. Enfin je le vis se precipiter a mes
pieds. Il saisit mes mains, les arrosa de ses
pleurs, et s'ecria: -- "Non, quoiqu'en pense
"le monde, je ne puis ni ne veux abandonner
"mon maeitre parce qu'il a perdu son ombre.
"Si je n'agis pas selon la prudence, j'agirai
"du moins selon la probite. Je demeurerai pres
"de vous; je vous preterai le secours de mon
"ombre; je vous rendrai tous les services qui
"pourront dependre de moi; je pleurerai du moins
"avec vous." A ces mots, je jetai mes bras
autour de son cou, je le serrai contre mon
coeur, etonne d'un si admirable devouement; car
je voyais bien que ce n'etait point le vil appat de
l'or qui le portait a se sacrifier ainsi pour moi.

Depuis ce moment mon sort et ma maniere
de vivre changerent. On ne saurait croire avec
quel zele, avec quelle adresse Bendel savait
remedier a ma deplorable infirmite. Toujours
et partout, il etait pres de moi, devant moi;

— «Bendel, repris-je en hésitant, après
«un assez long silence, Bendel, maintenant tu
«connais mon secret, et tu peux le trahir. Va,
«dénonce-moi; élève contre moi ton témoignage.»
— Je m’aperçus qu’un violent combat se pas-
sait en lui. Enfin je le vis se précipiter à mes
pieds. Il saisit mes mains, les arrosa de ses
pleurs, et s’écria: — «Non, quoiqu’en pense
«le monde, je ne puis ni ne veux abandonner
«mon maître parce qu’il a perdu son ombre.
«Si je n’agis pas selon la prudence, j’agirai
«du moins selon la probité. Je demeurerai près
«de vous; je vous prêterai le secours de mon
«ombre; je vous rendrai tous les services qui
«pourront dépendre de moi; je pleurerai du moins
«avec vous.» A ces mots, je jetai mes bras
autour de son cou, je le serrai contre mon
coeur, étonné d’un si admirable dévouement; car
je voyais bien que ce n’était point le vil appât de
l’or qui le portait à se sacrifier ainsi pour moi.

Depuis ce moment mon sort et ma manière
de vivre changèrent. On ne saurait croire avec
quel zèle, avec quelle adresse Bendel savait
remédier à ma déplorable infirmité. Toujours
et partout, il était près de moi, devant moi;

<TEI>
  <text>
    <body>
      <div n="1">
        <pb facs="#f0047" n="29"/>
        <p>&#x2014; «Bendel, repris-je en hésitant, après<lb/>
«un assez long silence, Bendel, maintenant tu<lb/>
«connais mon secret, et tu peux le trahir. Va,<lb/>
«dénonce-moi; élève contre moi ton témoignage.»<lb/>
&#x2014; Je m&#x2019;aperçus qu&#x2019;un violent combat se pas-<lb/>
sait en lui. Enfin je le vis se précipiter à mes<lb/>
pieds. Il saisit mes mains, les arrosa de ses<lb/>
pleurs, et s&#x2019;écria: &#x2014; «Non, quoiqu&#x2019;en pense<lb/>
«le monde, je ne puis ni ne veux abandonner<lb/>
«mon maître parce qu&#x2019;il a perdu son ombre.<lb/>
«Si je n&#x2019;agis pas selon la prudence, j&#x2019;agirai<lb/>
«du moins selon la probité. Je demeurerai près<lb/>
«de vous; je vous prêterai le secours de mon<lb/>
«ombre; je vous rendrai tous les services qui<lb/>
«pourront dépendre de moi; je pleurerai du moins<lb/>
«avec vous.» A ces mots, je jetai mes bras<lb/>
autour de son cou, je le serrai contre mon<lb/>
coeur, étonné d&#x2019;un si admirable dévouement; car<lb/>
je voyais bien que ce n&#x2019;était point le vil appât de<lb/>
l&#x2019;or qui le portait à se sacrifier ainsi pour moi.</p><lb/>
        <p>Depuis ce moment mon sort et ma manière<lb/>
de vivre changèrent. On ne saurait croire avec<lb/>
quel zèle, avec quelle adresse Bendel savait<lb/>
remédier à ma déplorable infirmité. Toujours<lb/>
et partout, il était près de moi, devant moi;<lb/></p>
      </div>
    </body>
  </text>
</TEI>
[29/0047] — «Bendel, repris-je en hésitant, après «un assez long silence, Bendel, maintenant tu «connais mon secret, et tu peux le trahir. Va, «dénonce-moi; élève contre moi ton témoignage.» — Je m’aperçus qu’un violent combat se pas- sait en lui. Enfin je le vis se précipiter à mes pieds. Il saisit mes mains, les arrosa de ses pleurs, et s’écria: — «Non, quoiqu’en pense «le monde, je ne puis ni ne veux abandonner «mon maître parce qu’il a perdu son ombre. «Si je n’agis pas selon la prudence, j’agirai «du moins selon la probité. Je demeurerai près «de vous; je vous prêterai le secours de mon «ombre; je vous rendrai tous les services qui «pourront dépendre de moi; je pleurerai du moins «avec vous.» A ces mots, je jetai mes bras autour de son cou, je le serrai contre mon coeur, étonné d’un si admirable dévouement; car je voyais bien que ce n’était point le vil appât de l’or qui le portait à se sacrifier ainsi pour moi. Depuis ce moment mon sort et ma manière de vivre changèrent. On ne saurait croire avec quel zèle, avec quelle adresse Bendel savait remédier à ma déplorable infirmité. Toujours et partout, il était près de moi, devant moi;

Suche im Werk

Hilfe

Informationen zum Werk

Download dieses Werks

XML (TEI P5) · HTML · Text
TCF (text annotation layer)
TCF (tokenisiert, serialisiert, lemmatisiert, normalisiert)
XML (TEI P5 inkl. att.linguistic)

Metadaten zum Werk

TEI-Header · CMDI · Dublin Core

Ansichten dieser Seite

Voyant Tools ?

Language Resource Switchboard?

Feedback

Sie haben einen Fehler gefunden? Dann können Sie diesen über unsere Qualitätssicherungsplattform DTAQ melden.

Kommentar zur DTA-Ausgabe

Dieses Werk wurde im Rahmen des Moduls DTA-Erweiterungen (DTAE) digitalisiert. Weitere Informationen …




Ansicht auf Standard zurückstellen

URL zu diesem Werk: https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786
URL zu dieser Seite: https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/47
Zitationshilfe: Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 29. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/47>, abgerufen am 28.03.2024.