la tete. Je me rejetai d'un pas mal assure vers le nord, puis cherchant par un exercice violent a me procurer quelque soulagement, je me mis a courir de toutes mes forces d'orient en occi- dent, et d'occident en orient. Je passais inces- samment du jour a la nuit et de la nuit au jour, et chancelais du nord au sud et du sud au nord, a travers tous les climats divers.
Je ne sais combien de temps je roulai ainsi d'un cote du monde a l'autre. Une fievre ar- dente embrasait mon sang. Je sentais, avec la plus extreme anxiete, mes forces et ma raison m'abandonner. Le malheur voulut encore que dans cette course desordonnee je marchasse sur le pied de quelqu'un, a qui sans doute je fis mal. Je me sentis frapper, je tombai a terre, et je perdis connaissance.
J'etais, lorsque je revins a moi, mollement couche dans un bon lit, qui se trouvait au mi- lieu de plusieurs autres, dans une salle vaste et d'une extreme proprete. Une personne etait a mon chevet, d'autres se promenaient dans la salle allant d'un lit a l'autre. Elles vinrent au mien et s'entretinrent de moi. Elles ne me nom- maient que numero douze, et cependant sur une
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la tête. Je me rejetai d’un pas mal assuré vers le nord, puis cherchant par un exercice violent à me procurer quelque soulagement, je me mis à courir de toutes mes forces d’orient en occi- dent, et d’occident en orient. Je passais inces- samment du jour à la nuit et de la nuit au jour, et chancelais du nord au sud et du sud au nord, à travers tous les climats divers.
Je ne sais combien de temps je roulai ainsi d’un côté du monde à l’autre. Une fièvre ar- dente embrasait mon sang. Je sentais, avec la plus extrême anxiété, mes forces et ma raison m’abandonner. Le malheur voulut encore que dans cette course désordonnée je marchasse sur le pied de quelqu’un, à qui sans doute je fis mal. Je me sentis frapper, je tombai à terre, et je perdis connaissance.
J’étais, lorsque je revins à moi, mollement couché dans un bon lit, qui se trouvait au mi- lieu de plusieurs autres, dans une salle vaste et d’une extrême propreté. Une personne était à mon chevet, d’autres se promenaient dans la salle allant d’un lit à l’autre. Elles vinrent au mien et s’entretinrent de moi. Elles ne me nom- maient que numéro douze, et cependant sur une
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la tête. Je me rejetai d’un pas mal assuré vers
le nord, puis cherchant par un exercice violent
à me procurer quelque soulagement, je me mis
à courir de toutes mes forces d’orient en occi-
dent, et d’occident en orient. Je passais inces-
samment du jour à la nuit et de la nuit au
jour, et chancelais du nord au sud et du sud
au nord, à travers tous les climats divers.
Je ne sais combien de temps je roulai ainsi
d’un côté du monde à l’autre. Une fièvre ar-
dente embrasait mon sang. Je sentais, avec la
plus extrême anxiété, mes forces et ma raison
m’abandonner. Le malheur voulut encore que
dans cette course désordonnée je marchasse sur
le pied de quelqu’un, à qui sans doute je fis
mal. Je me sentis frapper, je tombai à terre,
et je perdis connaissance.
J’étais, lorsque je revins à moi, mollement
couché dans un bon lit, qui se trouvait au mi-
lieu de plusieurs autres, dans une salle vaste
et d’une extrême propreté. Une personne était
à mon chevet, d’autres se promenaient dans la
salle allant d’un lit à l’autre. Elles vinrent au
mien et s’entretinrent de moi. Elles ne me nom-
maient que numéro douze, et cependant sur une
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Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 113. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/145>, abgerufen am 28.07.2024.
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